Hier, trois personnes ont attiré mon attention sur cet article de La Presse; un texto de mon ami gériatre et deux posts sur LinkedIn, de Myriam et Amélie. En lisant l’article, je me suis rappelé mon lien inextricable avec Eric Topol, cet être humain passionné par la science, l’innovation et la technologie et cette belle histoire, trop brève, qu’aura été Pharmacie 3.0.

Tout a commencé après la lecture du livre de Eric, «The Creative Destruction of Medicine», publié en décembre 2011.

Après l’avoir lu, j’ai écrit un courriel pour lui dire comment j’avais l’impression de découvrir un monde qui m’était complètement inconnu. Il m’a demandé si je vivais dans une caverne… 🙂 Je ne voyais pas encore comment, mais j’étais certain qu’il serait possible d’utiliser les concepts qu’il décrivait dans son livre pour transformer le rôle que je jouais comme professionnel de la santé. Je me suis inscrit au congrès Wireless-Health organisé par Scripps, et c’est en octobre 2012, qu’Eric et moi nous sommes revus pour la première fois depuis la vente de the heart.org à WebMD sept ans plus tôt.

Pour la deuxième fois dans ma carrière d’entrepreneur, Eric m’a dit qu’il m’aiderait, par ses contacts, sa réputation et ses connaissances à démarrer mon entreprise. Mon projet de suivi à distance est né de la lecture de ce livre, de mes rencontres avec lui et de mon désir d’apporter l’innovation au monde de la pharmacie.

Durant cinq années, je vais courir les congrès de santé numérique, donner des conférences, faire le pharmacien et tester les «gadgets» que je vais accumuler au fil des ans.

Un de des dispositifs que j’utiliserai est fabriqué par la compagnie Amiigo. Une rencontre avec son CEO et co-fondateur, Abe Carter, me convainc d’utiliser leur bracelet pour la détection de fibrillation auriculaire.

Il faut se rappeler qu’à l’époque, Kardia de AliveCor n’était pas encore sur le marché et nous étions au moins à trois ans de son homologation par la FDA. La technologie de Amiigo était impeccable au niveau de la photopléthysmographie mais le jumelage du dispositif par Bluetooth au téléphone intelligent laissait à désirer. Il faut aussi se rappeler que je travaillais avec une cohorte de personnes âgées de 65 à 89 ans dans mes projets de santé connectée et il me fallait passer beaucoup de temps au coaching technique.

Les données anonymisées que je récoltais étaient transformées en «waveforms» qui permettaient au ingénieurs de Amiigo d’établir la signature d’un épisode de FA à partir du bracelet.

Durant mes années Pharmacie 3.0, j’ai eu la chance de travailler avec des étudiants en pharmacie pour leur stage de quatrième année. C’est durant un de ces stages que nous avons détecté chez un des porteurs du bracelet Amiigo un épisode de FA. Je suis certain que ces étudiants, maintenant pharmaciens, se souviendront longtemps de cette «découverte».

«Notre projet a mené à trois interventions significatives sur huit patients, donc un
taux de 37.5 % de retombées cliniques. Deux patients n’ont pas pu participer au projet
durant notre présence en raison de problèmes techniques.
Il est à noter qu’une des nos
interventions a confirmé, après avoir référé le patient à son médecin, un diagnostic de
fibrillation auriculaire.
«

Bien sûr, tout ceci relève de l’anecdote pour un esprit scientifique. Mais déjà, en 2015, sept ans avant la publication de l’article de La Presse, on pouvait déjà anticiper tout le potentiel des capteurs embarqués sur de jolis designs et propulsés par les algorithmes d’aujourd’hui. Il ne se passe presque pas un mois sans qu’on annonce une nouvelle homologation des autorités réglementaires ou une nouvelle étude clinique de grande envergure avec les bracelets. Sauveront-ils nos vies? Dans un article du blogue du Groupe du même nom, Luc Maurice résumait ainsi sa pensée:

«La santé connectée ira-t-elle jusqu’à vous sauver la vie ? C’est possible. Une chose est sûre, en vous permettant de mieux comprendre les paramètres qui influencent votre état de santé, les nouveaux outils technologiques favoriseront nécessairement la démocratisation de la médecine. En comprenant mieux les fluctuations de vos paramètres, vous pourrez ainsi réagir plus rapidement et mieux prendre votre santé en main, ce qui est une très bonne nouvelle pour nous tous. Nous aurons le privilège de vous côtoyer plus longtemps !

Pour ma part, je reste prudent. Les avancées technologiques peuvent difficilement avoir un impact clinique si on ne règle pas les nombreux freins à l’innovation qui existent en santé. Après tout, il aura fallu 144 ans et une pandémie pour qu’une consultation médicale téléphonique soit remboursée par la RAMQ. Pourtant, le téléphone a été inventé en 1876!